Fin de l’état d’urgence : pérennisons dès maintenant l’interdiction des sorties sèches en protection de l’enfance !

Depuis l’instauration du premier état d’urgence sanitaire le 24 mars 2020, une interdiction des sorties sèches des jeunes majeurs accompagnés en protection de l’enfance a été votée par le Parlement. Pour Muriel Pénicaud, alors Ministre du travail porteuse de l’amendement adopté, les conditions sanitaires économiques et sociales liées à la crise du covid rendaient inconcevables toutes ruptures de prises en charge. Or cette interdiction prendra fin brutalement en même temps que l’état d’urgence sanitaire le 1er juin prochain. Que vont donc devenir les jeunes majeurs jusqu’alors protégés par la loi ? Le collectif Cause Majeur ! demande que l’interdiction des sorties sèches des jeunes majeurs soit dans un premier temps prolongée puis pérennisée.

Des jeunes particulièrement touchés par les conséquences de la crise sanitaire

Au cours de la crise sanitaire, la situation des jeunes a fait l’objet d’une attention croissante et est désormais bien documentée. S’ils ont été peu touchés par le virus, ils sont les premiers concernés par les conséquences sociales et économiques de l’épidémie et des confinements successifs : perspectives d’emploi bouchées, précarité accrue, difficultés financières, etc. Le rapport de l’Assemblée Nationale fait au nom de la commission d’enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise sanitaire du Covid-19 sur les enfants et la jeunesse indique qu’ils subissent une série de ruptures, scolaires, affectives, psychologiques et que 50% sont préoccupés par leur santé mentale.*

Des mesures insuffisantes pour répondre aux besoins des jeunes les plus vulnérables

Cette prise de conscience de la situation des jeunes a notamment abouti à la mise en place du plan gouvernemental « Un jeune, une solution » qui répond principalement aux enjeux d’entrée dans la vie professionnelle, d’orientation, de formation et d’accompagnement à l’insertion.

Pour que ces mesures sectorielles soient suivies d’effets, il est primordial que les jeunes aient l’assurance que l’accompagnement socio-éducatif ne cessera pas du jour au lendemain. C’est seulement à cette condition que les besoins spécifiques de chaque jeune seront pris en compte et articulés avec les dispositifs de droit commun mis en place par le gouvernement. Sans ce soutien de type suppléance parentale, les facteurs d’inclusion quels qu’ils soient seront bien souvent mis en échec. Le constat du collectif sur ce point est sans appel.

Fin des sorties sèches : une disposition à pérenniser

Les jeunes ont été qualifiés de « génération sacrifiée » depuis le début de la crise sanitaire car les opportunités sont réduites en termes de formation et d’emploi, et qu’ils sont privés de l’insouciance caractéristique de cette période de la vie. Pour les jeunes majeurs issus de la protection de l’enfance, la crise vient accentuer les difficultés du passage à l’âge adulte qui étaient déjà nombreuses. En effet, la fin d’accompagnement dès leurs 18 ans pour le plus grand nombre, 21 ans pour quelques-uns, les contraint à des choix restreints en termes d’étude et d’emploi afin d’être autonomes le plus rapidement possible. De plus, cette injonction à l’autonomie les empêche de vivre une jeunesse sereine et épanouie, nécessaire à leur réalisation en tant qu’adulte.

L’interdiction des sorties sèches pendant l’état d’urgence sanitaire a été bénéfique pour de nombreux jeunes et prouve la pertinence des poursuites d’accompagnement socio-éducatif adapté au plus près de la situation du jeune. Le collectif Cause Majeur ! demande que l’interdiction des sorties sèches des jeunes majeurs soit dans un premier temps prolongée puis pérennisée.

En effet, la levée de l’Etat d’urgence ne signifie pas un retour à la normale. Les conséquences de la crise sanitaire vont se faire ressentir encore des mois durant. Par ailleurs, bien qu’aggravée par le contexte de la crise sanitaire, la problématique des jeunes majeurs est une question permanente et doit trouver une solution sur le long terme. Rappelons les statistiques d’avant crise : un quart des personnes sans-abri nées en France sont d’anciens enfants placés auprès de l’ASE ; un chiffre qui plafonne à 40% s’agissant des jeunes de moins de 25 ans. Le collectif n’ose imaginer l’impact de la crise sanitaire sur ce chiffre noir de la protection de l’enfance.

Cette interdiction des sorties sèches ne peut en revanche se résumer à un simple soutien financier comme cela a été le cas pour certains jeunes mis à l’abri mais sans autre modalité d’intervention. C’est pourquoi nous sommes convaincu·e·s que tout·e jeune doit se voir proposer une prise en charge individualisée co-définie et co-construite dans un projet d’accompagnement à l’âge adulte, dans la continuité de son projet personnalisé pour l’enfant. Ce projet doit permettre l’accès à un accompagnement inconditionnel et global, sans âge couperet, aussi longtemps que le·la jeune en a besoin.

*Assemblée nationale - Rapport fait au nom de la commission d’enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise sanitaire du covid 19 sur les enfants et la jeunesse, 16 décembre 2020

Contacts presse :

Coordination / SOS Villages d’Enfants : Florine Pruchon – fpruchon@sosve.org / 01 53 20 62 86 –06 63 04 19 74
Auriane Charlot – a.charlot@unionpourlenfance.com / 06 16 33 55 01
Sophie Diehl - s.diehl@citoyens-justice.fr / 06 03 87 17 06

Le Collectif « Cause Majeur ! » a été lancé en mars 2019 par des acteurs de la société civile (associations et personnalités qualifiées) pour soutenir la cause des jeunes majeurs sortant de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) ou de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ). ll veille à la cohérence et à la force des engagements à prendre pour tous les jeunes. Notre document de positionnement et nos recommandations pour une inclusion pleine et entière de ces jeunes peuvent être transmises sur demande.